POURQUOI OFFRE-T-ON DU MUGUET AU 1er MAI ?  

Le muguet porte-bonheur est devenu l'emblème de la fête du Travail, le 1er mai. Mais d'où vient cette tradition désormais ancrée dans notre calendrier ?

De l'ancien français mugue (= musc), du latin muscus (peut-être devenu musgue), lui-même emprunté au grec muskos, dérivé du sanskrit ou de l'iranien muska, signifiant « testicule », le muguet cultive dès la Grèce antique la réputation d'être une fleur divine. Comme il fleurit au printemps, il a toujours symbolisé le renouveau. Et si le muguet est associé aux fêtes du 1er mai, c’est peut-être tout simplement parce qu’il a la particularité de fleurir aux alentours de cette date. Le 1er mai, avant d'être la journée des travailleurs, était célébré en Europe occidentale et septentrionale par les coutumes de l'arbre de mai, un rite de fécondité lié au retour de la frondaison qui consistait à planter un arbre (ou un mât) dans le courant du mois.

Dans la Rome antique, la fleur donnait lieu à des célébrations, des festivités en l'honneur de la déesse des fleurs Flora qui atteignaient leur apogée le 1er mai. À l'instar des Celtes, les Romains se réunissait autour d'un arbre pour danser et chasser les esprits malfaisants, conférant ainsi au muguet des vertus de porte-bonheur.

De symbole de douceur et de félicité, le muguet fleurira également dans la tradition catholique comme l'emblème du renouveau et de la vie. Selon la tradition, les larmes versées par la Vierge Marie au pied de la Croix auraient donné naissance aux clochettes blanches. Selon la Bible, ce sont les larmes versées par Ève en quittant le jardin d’Éden qui seraient à l'origine de la création du muguet.

Durant l'ère médiévale, le muguet devient un symbole d'amour. On l'accroche au-devant des portes pour obtenir de son amoureux un doux baiser. En 1560, le roi Charles IX est en visite avec sa mère Catherine de Médicis dans la Drôme. Il reçoit un brin de muguet de la part du chevalier Louis de Girard de Maisonforte. Ravi par ce geste, il décide l'année suivante d'en distribuer aux dames de sa cour en guise de porte-bonheur en leur disant : « Qu'il en soit fait ainsi chaque année ». La tradition est née.

Le 1er mai 1895, le chanteur Félix Mayol (créateur du célébrissime Viens, Poupoule!) débarque à Paris pour la première d'une série de concerts (il arrive du Midi). Afin de lui porter chance, son amie Jenny Cook lui offre un bouquet de muguet. Il décide d’en arborer quelques brins à sa boutonnière. Une superstition payante. Le spectacle est un succès et Mayol décide alors de faire de cette fleur l'emblème du bonheur. Il en portera toujours à la boutonnière. Très populaire à l'époque, le chanteur aurait relancé la tradition.

En 1900, à l'occasion d'une grande fête, les grands couturiers parisiens offrent à chaque femme un brin de muguet. Une idée charmante pour les couturières qui choisiront dès lors d'en offrir chaque année à leurs clientes.

À partir du début du XXe siècle, il devient donc habituel, à l'occasion du 1er mai, d'offrir ce brin de muguet, symbole du printemps.

La fleur aux clochettes blanches carillonne tous les 1er mai dans la rue et est, de fait, associée à la Fête du Travail qui a lieu le même jour. Une tradition enracinée depuis plus de soixante-dix ans dans le calendrier par un certain… Philippe Pétain.

Au départ, la fête du travail commémore un 1er mai de 1886 où les syndicats américains appelèrent plus de 400 000 travailleurs à manifester à Chicago pour l'obtention de la journée de huit heures. La date du 1er mai avait été choisie car beaucoup d’entreprises américaines entamaient ce jour-là leur année comptable.

Trois ans plus tard, le congrès de la IIe Internationale socialiste se réunissait à Paris pour le centenaire de la Révolution française. Il décidait de faire du 1er mai une "journée internationale des travailleurs", avec pour objectif d'imposer la journée de huit heures. Une date choisie en mémoire du mouvement du 1er mai 1886. Les manifestants du 1er mai prirent l'habitude de défiler en portant à la boutonnière un triangle rouge, qui sera quelques années plus tard remplacé par une églantine écarlate, fleur emblématique du mouvement, probablement en mémoire au sang versé le 1er mai 1891 lors la répression du rassemblement ouvrier de Fourmies (Nord) qui fit 9 morts et 35 blessés.

Depuis, le premier mai était donc devenu le jour international des revendications ouvrières, donnant lieu à des défilés de travailleurs. Le muguet ne deviendra cependant le symbole de la Fête du Travail que sous le gouvernement de Vichy. Le 24 avril 1941, plus précisément, lorsque le maréchal Pétain imposera le 1er mai comme « la Fête du Travail et de la Concorde sociale ». Le maréchal impose alors le muguet pour remplacer l'églantine rouge, jugée "trop prolétarienne, trop rouge, trop révolutionnaire". Exit l'églantine rouge qui était jusqu’alors l’emblème traditionnel de la journée internationale des travailleurs. Vive le muguet !